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14/06/2015

La nécessité d'écrire nous-mêmes notre Constitution

12/06/2015

L'anarchisme conservateur et l'anarchisme de droite (2/3)

0YhY9LAP0kzGUQBEBYkK8R0btgk.jpg(Extrait de mon prochain livre Anarchiste conservateur, Louison Chimel)
L’attachement de l’anarchiste de droite à une certaine aristocratie peut parfois lui faire regretter le régime monarchique sous lequel on retrouvait une aristocratie officielle avec la noblesse d’épée. Jacques Laurent, l’un des Hussards – mouvement littéraire hétéroclite de droite, opposé à l’existentialisme et aux intellectuels de gauche (dont Jean-Paul Sartre) mais aussi au gaullisme – écrit : « Le pouvoir est méprisable, non parce qu’il est bas en lui-même mais parce qu’il est bas de le vénérer. » Pensée pouvant très bien coller à celle d’un quelconque anarchiste de droite.
(Les citations de ce paragraphe sont tirées de l’entretien de François Richard pour la revue Éléments en 1991). La chose spécialement intéressante chez l’anarchiste de droite, c’est son insistance sur l’effort individuel afin de concilier intégrité et bienveillance – du moins à l’égard de ceux qu’il apprécie et tient pour respectable. Si l’anarchiste de droite joue l’anti-modèle, c’est parce qu’il cherche à faire bouger les lignes, à choquer les mentalités afin de les élever moralement. Le « refus de toute autorité instituée » est « compensé » par une « révolte individuelle au nom de principes aristocratiques ». Il ne s’agit pas d’attendre que des individus prétendument exemplaires nous montrent la voie à prendre mais de la trouver nous-mêmes, d’être nous-mêmes exemplaires. C’est en cela qu’il y a croisement d’une éthique aristocratique avec une éthique anarchiste. Soient « une synthèse entre les aspirations libertaires de l’homme (anarchisme) et son esprit de rigueur (celui d’une droite aristocratique) » ou encore une harmonie « entre le culte de l’exigence et celui de la liberté ».
Ceux qui ont lu mon livre sur L’Anarque remarqueront que, telle que je la conçois, la figure de ce dernier peut faire penser à un anarchiste de droite. Toutefois, la teneur de l’éthique de l'Anarque est plus profondément anarchiste dans le sens où elle ne s’arrête pas notamment à la non-reconnaissance intérieure des hiérarchies mais s’inscrit dans une sensibilité anticapitaliste digne des anarchistes sociétaires (socialistes ou communistes) tandis que l’idéal économique et social de l’anarchiste de droite reste flou.

L’anarchiste de droite est un amoureux de l’ivresse pour diviniser sa destinée. Attention, il n’est pas l’anarchiste chrétien – trop sage, idéaliste et prude par rapport à lui.
L’anarchiste de droite est fraternel, surtout avec les individus du même sexe que lui. Et comme il est très généralement un homme… Les femmes ne trouvent pas souvent leurs places au sein des « confréries » anarcho-droitistes. Elles devront mettre en sourdine leur éventuelle discours égalitaire pour accepter une complémentarité faisant le moins d’ombre possible à la virilité de l’anarchiste de droite, qu’il expose moins par sa force physique que par sa force morale et sa vivacité d’esprit. J’ai, sinon, parlé de « confréries » mais il faut bien mettre des guillemets. Chez les anarchistes de droite, pas de rituel ni de symbolique collective particulière. Ils ne se prennent pas assez au sérieux pour ce genre de choses. Et même, ils moqueront ceux qui en ont. Ivresse oblige, leur fraternité peut, en soirée, reposer sur une consommation partagée d’alcool jouant le rôle de médiateur. D’où les films que j’aime beaucoup : Un singe en hiver et surtout Les Tontons flingueurs. Leurs dialogues sont de l’admirable Chimel Audiard. D’ailleurs, selon lui, « les hurluberlus, les mabouls, on ne les trouve qu'à droite. La droite est branque, il ne faut jamais l'oublier ». Tandis qu’à gauche, « c'est du sérieux », poursuit-il dans le livre Audiard par Audiard. Les gens de gauche « ne sont pas très indulgents avec les idées des autres ». D’ailleurs, il nous dit : « C’est la gauche qui me rend de droite. »
Audiard admirable ? Il sait manier la langue de sorte que se rencontrent et se croisent habilement ses meilleurs formulations d’hier et d’aujourd’hui, les génies des langages soutenu et familier (argot des brigands en l’occurrence). En bon anarchiste de droite, Audiard aurait-il favorisé la réconciliation entre « le populo et l'aristo » ? Cette expression est de l’essayiste Sébastien Lapaque que je continue de citer, à travers un article paru dans Marianne en juillet 1999. Il nous dit : « Dans Les Tontons flingueurs, la jactance du café du Commerce fusionne avec la langue du XVIIe siècle. « On ne devrait jamais quitter Montauban », lâche Ventura, qui cause soudain comme La Rochefoucauld. Il n'est d'ailleurs pas anodin que le trio Lautner-Simonin-Audiard ait écrit le scénario au Trianon Palace à Versailles. Gavroche chez le Roi-Soleil ! Une ironie que le jeune cinéma français rasoir et minimaliste d'aujourd'hui est incapable d'assumer : les intellos de gauche n'aiment ni les bistrots ni les châteaux. » Dans ce film, Lino Ventura joue le rôle principal. Georges Lautner en est le réalisateur. Albert Simonin est le célèbre auteur de la trilogie de romans policiers concernant le personnage Max le Menteur : Touchez pas au grisbi, Le cave se rebiffe et, justement, Les Tontons flingueurs, tous trois adaptés au cinéma.

09/06/2015

L'anarchisme conservateur et l'anarchisme de droite (1/3)

images?q=tbn:ANd9GcTs72z_IL-TwdQhmofogCz7NNhMOXVOdgJXSa3WIURUcMt-dN9f0j-89VeGMQ(Extrait de mon prochain livre Anarchiste conservateur, Louison Chimel)
Par rejet de la démocratie, l’anarchisme de droite peut se confondre avec un anarchisme élitiste. Toutefois, les partisans ne se considèrent pas forcément eux-mêmes comme une élite. A vrai dire, s’ils refusent de légitimer l’autorité de leur voisin sur eux, ce n’est pas pour imposer la leur.
Les anarchistes de droite méprisent, en général, la démocratie. Disons qu’ils aiment surtout souligner, avec cynisme et ironie, que nous vivons sous une fausse démocratie malgré tous les procédés psychologiques et intellectuels des responsables politiques, et experts attitrés, destinés à nous faire croire le contraire et à appuyer, par là, la vraie ploutocratie dans laquelle nous évoluons. Je peux donc aisément – et c’est ce que je fais dans ce livre – dénoncer, avec les anarchistes de droite, cette fausse démocratie et l’asservissement associé. Je m’en remets notamment aux critiques émises entre autres par le syndicaliste révolutionnaire Georges Sorel. A la différence, par contre, des anarchistes de droite, je défendrai clairement la vraie démocratie, avec l’ensemble des dispositions communes qui s’en rattache – que ce soit dans le domaine de l’éthique ou dans celui de l’institution. Pour certaines raisons, l’anarchisme de droite, lui, sera pris pour de l’anarchisme individualiste. Anarchistes de droite et individualistes peuvent se retrouver dans le passage suivant : « L’Anarque, conscient de l’absurde – détenu en chaque homme – peut s’amuser à penser, comme Pierre Desproges, que « les aspirations des pauvres ne sont pas très éloignées des réalités des riches ». Louis-Ferdinand Céline, de son côté, écrivit que le prolétaire était un bourgeois qui n’a pas réussi. » (L'Anarque) Cela fait un point commun entre anarque, anarchiste de droite et anarchiste individualiste. Effectivement, s’il est anarchiste de considérer l’unicité individuelle, on ne peut pas affirmer que le degré de bienveillance soit identique d’un prolétaire à un autre ou d’un bourgeois à un autre. Des bourgeois ont même une meilleure conduite que des prolétaires. Sans être convaincu par le propos, j’entends aussi André Malraux qui, dans Les Conquérants, écrit : « Je les préfère [les pauvres], mais uniquement parce qu'ils sont des vaincus. Oui, ils ont, dans l’ensemble, plus de cœur, plus d'humanité que les autres : vertus de vaincus. Mais je sais très bien qu'ils deviendraient abjects, dès que nous aurions triomphé ensemble. »
En revanche, l’anarchiste de droite défend des valeurs traditionnelles, et même aristocratiques – l’auteur Chimel-Georges Micberth (1945-2013) disait défendre un « aristocratisme libertaire ». L’anarchiste de droite est un anticonformiste pouvant avoir recours à la Tradition. L’anarchiste individualiste n’est pas forcément lié à la Tradition. Il puise, éventuellement beaucoup, sa philosophie dans le libéralisme promouvant la liberté individuelle.

L’anarchiste conservateur, tel George Orwell, affirme qu’on est à même de retrouver des valeurs traditionnelles parmi les gens ordinaires. S’il s’arrêtait à cela, nous pourrions le comparer à un anarchiste de droite. Or, il précise que la common decency – cette décence des gens ordinaires, découlant de leur conservation d’un sens du passé et du langage, du partage et de l’entraide – constitue un socle de valeurs pour l’avènement d’un socialisme populaire. Les anarchistes de droite, de par leurs postures inégalitaires issues de leur « aristocratisme », n’insisteront pas, eux, sur cette common decency. Par ailleurs, ils ne parleront jamais en bien d’une quelconque forme de socialisme.
L'anarchiste conservateur et l'anarchiste de droite souhaiteront parfois conserver la même chose. En revanche, le premier peut valider certaines analyses marxistes et considérer les inspirations bienveillantes d'un Maximilien Robespierre. Le second conchie notamment l’héritage des Lumières et les pensées jacobines et marxistes. L’écrivain François Richard, collaborateur de Micberth ayant publié plusieurs ouvrages sur l’anarchisme de droite, écrit : « La caractéristique de tous [les anarchistes de droite] que leur forte individualité sépare et rend parfois hostiles les uns aux autres, c'est le refus des mots creux, des abstractions grotesques imposées comme valeurs suprêmes du Progrès à majuscule et d'une république considérée par Léon Bloy comme « le droit divin de la médiocrité absolue. » (L'anarchisme de droite dans la littérature contemporaine).
L’autocritique de l’anarchiste conservateur devient, chez l’anarchiste de droite, autodérision. Orwell, dans Le Quai de Wigan, écrit : « Je suis un semi-intellectuel décadent du monde moderne, et j’en mourrais si je n’avais pas mon thé du matin et mon « New statesman » du vendredi. Manifestement je n’ai pas envie de revenir à un mode de vie plus simple, plus dur, plus fruste et probablement fondé sur le travail de la terre.... Mais en un autre sens, plus fondamental, j’ai envie de tout cela et peut-être aussi en même temps d’une civilisation où le « progrès » ne se définirait pas par la création d’un monde douillet à l’usage des petits hommes grassouillets. » Où situer l’auteur anglais avec ce propos-là ? Entre les deux précédentes postures ? Car je doute qu’un anarchiste de droite se voie tel « un semi-intellectuel décadent du monde moderne ». En tous les cas, j’apprécie cette citation, soulignant l’imperfection de tout être humain, reconnaissant ses limites psychologiques qui ne lui permettent pas toujours de mettre en accord ses actes avec ses idées (mais une forme d’humilité se dégage de cet aveu).
Le droitisme de l’anarchiste de droite – qui a tendance à avoir une bonne estime de lui – ne doit pas être comparé avec une inclination à la bourgeoisie qu’il déteste, même si, à cause de son attitude éventuellement hautaine, nous risquons de le prendre pour un bourgeois. La noblesse est morte. Les snobs, par définition, veulent les singer. Les anarchistes de droite désirent être les nouveaux nobles, mais d’abord pour eux-mêmes. Il ne s’agit pas d’imposer quoi que ce soit auprès du peuple, au risque sinon de passer pour les snobs qu’ils méprisent ardemment.

07/06/2015

La cithare du bonheur (conte soufi)

photogal_155T1.jpgC'était un homme droit et sincère qui cherchait le chemin du bonheur, qui cherchait le chemin de la vérité. Il alla un jour trouver un vénérable maître soufi dont on lui avait assuré qu'il pourrait les lui indiquer. Celui-ci l'accueillit aimablement devant sa tente et, après lui avoir servi le thé à la menthe, lui révéla l'itinéraire tant attendu : « C'est loin d'ici, certes, mais tu ne peux te tromper : au coeur du village que je t'ai décrit, tu trouveras trois échoppes. Là te sera révélé le secret du bonheur et de la vérité. »

La route fut longue. Le chercheur d'absolu passa maints cols et rivières. Jusqu'à ce qu'il arrive en vue du village dont son cœur lui dit très fort : « C'est là le lieu ! Oui, c'est là ! » Hélas ! Dans chacune des trois boutiques il ne trouva comme marchandises que rouleaux de fils de fer dans l'une, morceaux de bois dans l'autre et pièces éparses de métal dans le troisième. Las et découragé, il sortit du village pour trouver quelque repos dans une clairière voisine.

La nuit venait de tomber. La lune remplissait la clairière d'une douce lumière. Lorsque tout à coup se fit entendre une mélodie sublime. De quel instrument provenait-elle donc ? Il se dressa tout net et avança en direction du musicien. Lorsque, stupéfaction, il découvrit que l'instrument céleste était une cithare faite de morceaux de bois, des pièces de métal et des fils d'acier qu'il venait de voir en vente dans les trois échoppes du village.

A cet instant, il connut l'éveil. Et il comprit que le bonheur est fait de la synthèse de tout ce qui nous est déjà donné, mais que notre tâche d'hommes intérieurs est d'assembler tous ces éléments dans l'harmonie.

27/05/2015

L'intérêt de l'apprentissage du latin selon Marcel Pagnol

22/05/2015

Jacques Verges sur le colonialisme


Jacques VERGES par le_citoyen

19/05/2015

Résistance : Ahmed, triple amputé et professeur à Gaza

ahmed-triple-ampute-et-professeurparmi_les_e_le_ves-9e15a-c0e34.jpgReportage photos de Reuters sur Ahmed al-Sawaferi, 25 ans, amputé des deux jambes et du bras droit par un bombardement israélien à Gaza en 2008, qui a néanmoins réussi à poursuivre des études et à enseigner.

« En juin prochain, Ahmed finira son cursus universitaire et obtiendra un diplôme en études islamiques. Père de deux enfants, il bénéficie de l’aide de ses proches, notamment son neveu, au quotidien", rapporte l’agence Ruters.

En attendant, il enseigne dans une école primaire de Gaza City, où le photographe de l’agence Reuters l’a suivi. Malgré ses trois membres en moins, il réussit à donner des cours, se déplaçant parfois avec l’aide de ses collègues.

Pour les amputés de Gaza, le quotidien est souvent très compliqué. La Croix-Rouge donne au Centre prothétique de Gaza des prothèses, mais ce dernier peine à fonctionner en raison de manque de moyens humains et financiers. »

En savoir plus, et voir d'autres photos, en cliquant ici.

 

10/05/2015

Entrevue de l'auteur du livre Le Meilleur des Mondes : le visionnaire Aldous Huxley (1958)


Aldous Huxley - Le Meilleur des Mondes - 18 Mai... par AlbertLAPOITE

23/04/2015

Pasolini et l'amour des gens simples (3/3)

Pratt.gifNOTES (1) Pasolini est mort assassiné en pleine nuit sur la plage d’Ostie, ville proche de Rome. Les circonstances de sa mort restent controversées. Peu avant sa mort toutefois, nous pouvons préciser que l’écrivain avait commencé un roman politique nommé Petrolio parlant des liens entre les dirigeants politiques italiens, la mafia et la société italienne d’hydrocarbures E.N.I.

(2) Parallèlement à ces propos de Pier Paolo Pasolini, je souhaite mettre ceux de Hugo Pratt, l’auteur des bandes dessinées de l'anarque Corto Maltese, dans son livre Le désir d'être inutile : « A cette école primaire, quand j’avais sept ans, il m’est arrivé un incident étrange. A la suite d’une insolation, j’ai perdu la mémoire. Je suis resté pendant six mois en état de choc, ne me souvenant plus que d’une grande lumière, puis je suis brusquement redevenu normal. Pendant toute cette période, on m’avait mis dans une section spéciale de mon école, réservée aux élèves déficients mentaux. Nous étions huit, et devions porter un uniforme noir, alors que les élèves normaux étaient habillés en blanc. Quand je me suis comme réveillé, on m’a redonné l’uniforme blanc, et les élèves considérés comme débiles m’ont demandé : « Mais qu’est-ce que tu fais là, habillé en blanc comme tous ces cons ? » J’ai finalement préféré rester avec ces sept élèves, j’avais plus d’amitié pour eux que pour les autres. Je me demande si certains ne faisaient pas semblant d’être déficients mentaux, car on était moins exigeants pour les élèves de cette section. Ce qui m’intrigue aussi, c’est que ces sept élèves s’en sont bien tirés plus tard. L’un d’eux vend des souvenirs aux touristes, place Saint-Marc, à Venise. A chaque fois qu'il me voit, il s’exclame : « Hugo, tu te rappelles quand nous étions dans notre école de débiles ? » Quand je me promène avec, par exemple, un éditeur, c’est une phrase qui fait sensation. »

(3) Hommage à l’écriture poétique de Pasolini avec un extrait de son recueil autoédité Poésie à Casarsa (1941-42) :

« J’ai le calme d’un mort :
je regarde le lit qui attend
mes membres et le miroir
qui me reflète absorbé.
Je ne sais vaincre le gel
de l’angoisse, en pleurant,
comme autrefois, dans le cœur
de la terre et du ciel.
Je ne sais feindre ni calme
ni indifférence ou autres
exploits juvéniles
couronnes de myrte ou palmes.
Ô Dieu immobile que je hais,
fais que jaillisse encore
vie de ma vie,
peu m’importe comment. » 

Louison Chimel dans Anarchiste conservateur (livre non encore paru)

20/04/2015

Décès de l'instructeur de boxe française Jean Lafond : hommage en vidéo

« La boxe française est un jeu hardi, imprévu, étincelant,
plein d'illuminations romantiques. » (Théophile Gautier)

18/04/2015

Pasolini et l'amour des gens simples (2/3)

que-reste-t-il-de-pier-paolo-pasolini,M131097.jpg

Notre cinéaste italien, né à Bologne, a été enseignant. Sous le régime fasciste de la République sociale italienne (1943) Pasolini assure chez lui, à Casarsa della Delizia, des cours pour les lycéens qui, à cause des bombardements, ne peuvent plus regagner leurs établissements scolaires. A savoir : Susanna, la mère de Pier Paolo – avec qui elle vit – a été institutrice à Casarsa. A cause des agitations dues à la guerre, l’écrivain et sa mère partent habiter, en octobre 1944, à Versuta, bourg de Casarsa situé à trois kilomètres du centre de la commune. Dans cette nouvelle habitation, ils vont faire idem : assurer des cours dans leur domicile. Et ce, pour les enfants trop loin de l’école encore ouverte. Entre-temps, Guido, le frère de Pier Paolo engagé dans la résistance, meurt dans l’épisode appelé le Massacre de Porzus (1945). Malgré la triste nouvelle, Pier Paolo continue d’assurer les cours chez lui. En 1946, grâce à sa thèse intitulée L’Antologia della poesia pascoliana : introduzioni e commenti, le futur cinéaste, adepte de la poésie(3), est officiellement reconnu enseignant. En 1948, il donne des cours de littérature à l’école de Valvasone.

Je connais des gens qui sont peu allés à l'école. Ils n'écrivent pas correctement le français. Ils ont, dans leur vie, lu très peu de livres voire pas du tout. Pourtant, je suis loin de trouver qu'ils sont épargnés par la grâce, pour reprendre le terme pasolinien. Maintenant, la condition d’analphabète peut rendre malheureux dans bien des situations… 

Dans tous les cas, c'est moins la connaissance pour elle-même qui est à honorer – soviétisme et nazisme sont des idéologies se voulant très réfléchies – que la conscience morale à l'intérieur de cette connaissance. Aussi, il faut que la connaissance, quel que soit son degré, sache laisser une place non négligeable aux sentiments. Il faut espérer, même chez celui qui a fait de « hautes études », une intacte conservation de la moralité et de la sentimentalité. Dans un sens, un grand degré de connaissance doit nous ramener à l’essentiel :
– naturel, nous rappelant qu’avant de penser nous ressentons, nous sommes disposés au sentiment ;
– culturel, nous rappelant l’importance de la morale au sens large, notre volonté à faire société et à détenir un bon sens partagé. Louison Chimel dans Anarchiste conservateur (livre non encore paru)

12/04/2015

Pasolini et l'amour des gens simples (1/3)

Pour commencer cette partie, un point étymologique sur la sensibilité morale. Il nous éclaire pour la suite. Sensibilité vient du latin sensibilitas, faculté de sentir. Or naturellement, la faculté de sentir est également la sentimentalité. Pour être réceptif, il faut être sensible. Pour sentir, il faut être en mesure de recevoir. Sentimentalité et sensibilité sont synonymes par la réceptivité naturelle dont elles dépendent. On est alors touché par le comportement d’un individu, que ce soit purement affectivement ou bien moralement. Le second cas concerne la sensibilité morale. Elle est donc :
– la sentimentalité qui interroge notre discernement moral, nos visions spontanées de ce qui est bon de faire (éthique), de ce qui est bien ou mal (morale) ;
– notre moralité naturelle, notre faculté au discernement moral comme une des conséquences directes de notre réceptivité. 

Il existe une idée consistant à dire qu’il n’y a pas besoin d’être très instruit ou d’avoir fait de « hautes études » pour posséder cette élémentaire sensibilité morale dès qu’elle touche le plus grand nombre et s’incarne dans la Décence des gens ordinaires, la Common decency. George Orwell, l’inventeur de ce dernier concept se serait, je pense, bien entendu avec l’homme que je veux maintenant citer. Il s’agit du cinéaste, écrivain et journaliste italien Pier Paolo Pasolini (1922-75) (1) dans une entrevue : « Le type de gens que j'aime beaucoup plus sont ceux qui, éventuellement, n'ont même pas terminé l'école primaire, c'est-à-dire les gens absolument simples, mais ne mettez pas de la rhétorique dans ma déclaration, je ne fais pas de la rhétorique. Je dis cela parce que la culture de la petite bourgeoisie, du moins dans mon pays, mais peut-être aussi en France et en Espagne, est quelque chose qui conduit toujours à la corruption et l'impureté ; tandis qu'un analphabète, celui qui a accompli les premières années d'école primaire, garde toujours une certaine grâce, qui se perd par la suite à travers la culture et se retrouve finalement à un très haut degré de culture. » (2)

Je n’adhère pas aux généralisations de Pasolini qui découlent de cet extrait. Pasolini serait un marxiste conservateur (...) plutôt qu’un anarchiste conservateur, comme Orwell. Sa lecture de classes est catégorique. Mon anarchisme conservateur, au nom de la considération de l’unicité de chacun, m’empêche de faire une généralisation sur les aspirations et comportements des individus qui composent une classe sociale en particulier. Et en même temps, il valide globalement la lecture de classes marxiste.

Il faut cesser, dans tous les cas, de trouver démagogique la moquerie de la richesse matérielle au profit de la richesse spirituelle. En outre, il ne faut pas voir, dans les propos de Pasolini, la justification ou une défense pure et simple du non-accès au savoir. Louison Chimel dans Anarchiste conservateur (livre non encore paru)

06/04/2015

Heureuses fêtes de Pâques

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02/04/2015

Liberté, authenticité et risque contre autorité, par P.-P.Pasolini

images?q=tbn:ANd9GcQvJvfk7Jdnt6uzsEcCyJlOoIy9T7lawpnUz6Wcu7XMUzR1EiNm1bJnU9tz1g« Une idée qui semble immédiatement aberrante à une personne normale : pour écrire quelque chose, il faut que quelqu'un possède une « autorité ». Sincèrement, je ne comprends pas comment on peut avoir une telle idée en tête. J'ai toujours pensé, comme n'importe quelle personne normale, que derrière qui écrit doit se trouver la nécessité d'écrire, la liberté, l'authenticité, le risque. Penser qu'il doive y avoir quelque chose d'officiel et de social qui « fixe » l'autorité de quelqu'un est une pensée […] évidemment due à la déformation subie par qui ne sait plus concevoir la vérité en dehors de l'autorité.
Moi, je n'ai derrière moi aucune autorité, sinon celle qui me vient paradoxalement de n'en pas avoir et de ne pas en avoir voulu. » (Pier Paolo Pasolini, Ecrits corsaires)

28/03/2015

Une chanson sur El Libertador Simon Bolivar (Inti Illimani)

24/03/2015

Faire la grève contre l'invasion de l'anglais

JPF.jpgQuelle mouche a piqué Chimel Serres? Le philosophe français, amoureux du langage et des langues, un des rares penseurs de l’hexagone à ne pas vouer le web aux gémonies, enseignant à Stanford, pique une sacrée colère contre l’invasion de l’anglais. Non, pas contre l’anglais, langue de la communication, mais contre l’anglais utilisé à tout va  dans les publicités. Que dit l’auteur de la petite Poucette dans un entretien accordé ce dimanche à la Dépêche du Midi ?

Qu’il en a «marre que la SNCF nous fasse des “smiles”». Il est tellement énervé, Chimel Serres, qu’il veut inviter les Français à faire la grève de la langue de Shakespeare, ou plutôt celle de Ronald McDonald. «Chaque fois qu’une publicité sera en anglais on n’achète pas le produit, chaque fois qu’un film ne sera pas traduit dans le titre, on ne rentrera pas dans la salle de cinéma. On ne rentre pas dans un shop, on entrera dans une boutique. Et dès lors que les publicitaires et les commerçants auront 10 % de moins de chiffre d’affaires, ne vous en faites pas, ils reviendront au Français.»

Ce n’est pas la première fois que Serres s’en prend avec virulence à l’invasion de l’anglais dans le langage de tous les jours, dans des buts purement commerciaux, et qui mettent selon lui en péril la langue française. Serres, qui parle même de danger de mort, avait donné des arguments aux opposants à l’arrivée de l’anglais à l’université, lors du débat qui a agité les intellectuels et les universitaires français au printemps 2013. Interrogé sur France Info fin mars, il avait dit:

«Une langue vivante, c'est une langue qui peut tout dire (…) une langue vivante est un iceberg. [la partie émergée] «est représentée par les mots du langage courant». [Ce qui est important] c'est la partie immergée, c’est à dire tous les langages spécialisés. Et «une langue vivante, c'est la somme de ces langues spécialisées. Il suffit qu'une langue vivante perde un ou deux de ces corpus et elle est virtuellement morte.Enseigner en anglais nous ramènerait, par disparition de ces corpus-là, à un pays colonisé dont la langue ne peut plus tout dire».

Plus politique dans la Dépêche, Serres s’en prend à la «classe dominante [qui] n’a jamais parlé la même langue que le peuple. Autrefois ils parlaient latin et nous, on parlait français. Maintenant la classe dominante parle anglais et le français est devenu la langue des pauvres ; et moi je défends la langue des pauvres. Voilà, c’est pour ça que je demande qu’on fasse la grève».

Et pour qu’on prenne bien conscience du danger, l’académicien relocalise à Toulouse ce qu’il avait déjà dit en 2010 à propos de Paris: «Il y a plus de mots anglais sur les murs de Toulouse qu’il y avait de mots allemands pendant l’occupation.» Comment on traduit Godwin déjà? Slate.fr, 20 octobre 2013

17/03/2015

Retrouvez-moi en conférence à Montpellier

1501705_1549162402032477_9163610876932613055_n.jpg?oh=9b032cdb7ff32a5053f2c90fc0cbbc8e&oe=55860F01&__gda__=1437794359_66a188d1f5f149cf8ffd518d0a607e8b

11/03/2015

Hommage en chanson à Hugo Chavez, mort il y a deux ans

23/02/2015

Attentat démocratique : vidéo sur la vraie démocratie

16/02/2015

Humains

Vidéo retrouvable sur le blog d'une amie : bookofgenesis.wix.com/origine-humanite

14/02/2015

Le langage en politique (3/3)

george_orwell_poster-r498b62ece7aa4b15a36a0135be6df661_wvg_8byvr_324.jpgAlors, que défendre et comment résister ? Je donne ici, mais aussi dans d’autres parties, des éléments de réponse. Dans 1984, George Orwell écrit : « Vers 2050, plus tôt probablement, toute connaissance de l’ancienne langue aura disparu. Toute la littérature du passé aura été détruite. Chaucer, Shakespeare, Milton, Byron n’existeront plus qu’en version novlangue. Ils ne seront pas changés simplement en quelque chose de différent, ils seront changés en quelque chose qui sera le contraire de ce qu’ils étaient jusque-là. » En nous inspirant d’Orwell, nous devrions, à l’écrit, mettre des guillemets inversées aux mots dont le sens est régulièrement détourné par les pouvoirs médiatiques et politiques. Ce qui attirerait l’attention du lecteur afin de lui faire prendre conscience que l’utilisation moderne et banalisée des mots en question est insidieuse. Ainsi, même si la liste de ceux-là est longue, nous pourrions, par exemple, écrire » démocratie «, » république «, » socialisme «, » conservateur «. Le concept d’anarchie est lui-même connoté. Dans le langage courant, il est souvent comparé au laisser-faire, au chaos, à l’anomie alors qu’en fait il est politiquement, et plus sérieusement, associé à une vision de l’ordre social absolu demandant entre autres la responsabilisation individuelle.

Parce que nous pouvons bien, à notre époque, concevoir le novlangue comme le langage utilisé par l’élite médiatico-politique qui détourne les mots de leurs vrais sens dans le but d’entretenir sa malhonnête influence sur le peuple.
La définition du « maître du langage » que je donne dans cette partie a elle-même recours au novlangue, à d’insidieuses définitions de mots. Dans ce cas précis, effectivement, ne sont estimables ni le maître ni le langage.
D’autres exemples d’usage du novlangue dans ce passage de George Orwell tiré de son essai La politique et la langue anglaise : « Le langage politique doit […] consister en euphémismes, pétitions de principe et imprécisions nébuleuses. Des villages sans défense subissent des bombardements aériens, leurs habitants sont chassés dans les campagnes, leur bétail est mitraillé, leurs huttes sont détruites par des bombes incendiaires : cela s'appelle la « pacification ». Des millions de paysans sont expulsés de leur ferme et jetés sur les routes sans autre viatique que ce qu'ils peuvent emporter : cela s'appelle un « transfert de population » ou une « rectification de frontière ». Des gens sont emprisonnés sans jugement pendant des années, ou abattus d'une balle dans la nuque, ou envoyés dans les camps de bûcherons de l'Arctique pour y mourir du scorbut : cela s'appelle l' « élimination des éléments suspects ». Cette phraséologie est nécessaire si l'on veut nommer les choses sans évoquer les images mentales correspondantes. »

Toujours dans cet essai, Orwell, en opposition au novlangue, nous dit : « Ce qui importe avant tout, c'est que le sens gouverne le choix des mots, et non l'inverse. » Si, dans un échange ou une lecture, nous devions prendre l’habitude de considérer les mots de l’autre avec les sens qu’il veut bien leur donner et qui différencient des nôtres, l’incompréhension se généraliserait. Un langage aux codes non partagés un minimum est destiné à mourir rapidement. Dans le cas contraire, il aura tendance à coller à une langue qui confère aux mots un sens bien précis.

Quel intérêt, sinon, de vouloir donner un sens nouveau à un mot si ce n’est pour se moquer de la langue, jouer sur une certaine ambiguïté, chercher à tromper l’autre qui n’est pas sûr de ne pas avoir compris puisqu’on utilise pourtant un mot qu’il connaît ? C’est pourquoi il faut être vigilant, chercher parfois à lire entre les lignes, à comprendre pourquoi telle expression linguistique est née et est utilisée de manière récurrente dans les médias.

L'anarchiste conservateur, en ce qui le concerne, entend conserver les langues, nationales ou régionales, comme références d’un langage authentique et résistant au novlangue officiel, envahissant (totalitarisant) et décadent (aussi bien moralement qu’intellectuellement). Louison Chimel, extrait des Cahiers d'un Anarchiste conservateur

10/02/2015

Le langage en politique (2/3)

Il faut alors que ce nouveau verbe, cette nouvelle langue – dans 1984, Orwell parle de newspeak, traduit, en français, par novlangue –, soit le reflet de nouveaux comportements. Il s’agit bien d’entretenir une harmonie entre le verbal et le comportemental en faisant vivre, en nous, une nouvelle pensée, dans le but que la censure en question devienne autocensure d’abord consciente puis inconsciente. Car, en faisant disparaître certaines notions des écoles et des médias, il y a volonté de carrément limiter notre faculté de pensée, de contrôler notre psychologie, de perdre notre identité, pour devenir uniquement des êtres serviles – et consommateurs, dans le cas du capitalisme marchand (1) –, des anthropoïdes décérébrés et soumis, des animaux sans instinct propre à la nature mais régis par ceux qui gouvernent le Monde. Dans 1984, Orwell écrit : « Ne voyez-vous pas que le véritable but du novlangue est de restreindre les limites de la pensée ? […] Tous les concepts nécessaires seront exprimés chacun exactement par un seul mot dont le sens sera rigoureusement délimité. Toutes les significations subsidiaires seront supprimées et oubliées. […] Chaque année, de moins en moins de mots, et le champ de la conscience de plus en plus restreint. » Ou encore, plus court : « La dictature s'épanouit sur le terreau de l'ignorance. »

Le « maître du langage » est forcément, dans l’absolu, le maître du Monde. En effet, il a su mettre le Monde à ses pieds. Il a su, par ses capacités supérieures de conviction, mettre les financiers dans sa poche pour l’aider à gagner des élections. D’où, concrètement, l’alliance contemporaine entre le politiquement correct de gauche et l’économiquement correct de droite, concepts de Jean-Claude Michéa abordés dans plusieurs parties de ce livre.

Ensuite, si besoin il y a, le « maître du langage » saura truquer les élections, en arrosant les huissiers devant s’assurer du bon déroulement des premières. Afin de se donner une apparence démocratique, il est institutionnellement capable d’user du parlementarisme dont les corrompus et faux représentants des peuples peuvent s’exprimer ainsi auprès d’eux : « Expliquez-nous quel est votre problème, on vous dira ce qu’il faut en penser. » (Coluche) L’écrivain et philosophe Alexis De Tocqueville (1805-59) nous dit quant à lui : « Je ne crains pas le suffrage universel : les gens voteront comme on leur dira. » Dans l’absolu, bien sûr, une population réellement soumise au « maître du langage » ne peut que voter pour lui, qui n’a plus besoin d’œuvrer avec une myriade de malices pour perdurer.

Le « maître du langage » devenu maître du Monde peut faire toute la propagande qu’il veut. Elle ne concerne pas forcément directement sa personne. Mais en choisissant de faire la une d’un journal avec telle ou telle affaire de société (relevant de la géopolitique au fait divers le plus banal), elle est quand même toujours tournée à son avantage.

Enfin, le maître du Monde peut bien évidemment réécrire l’histoire, redistribuer les cartes des vainqueurs et des vaincus (d’où la partie suivante). Qu’il y ait néanmoins des gens qui ont de la mémoire, le contrôle de leur pensée se fera de sorte qu’ils aient la mémoire courte ou, en tous les cas, sélective. Puisqu’en effet le maître du novlangue contrôle votre psychologie, il ne s’arrête pas qu’à votre pensée, votre flux de conscience, mais il compte bien visiter le tréfonds de votre conscience et même les bas-fonds de votre inconscient.
Orwell écrit : « Un des buts du totalitarisme est non seulement d'assurer que les gens auront les pensées qu'il faut, mais en réalité de les rendre moins conscients. » (Essais, Articles, Lettres volume 4Louison Chimel, extrait des Cahiers d'un Anarchiste conservateur

08/02/2015

Demis Roussos et Aphrodite's Child

Si j'aime beaucoup Demis Roussos, qui nous a quittés récemment,
j'aime tout particulièrement le groupe Aphrodite's Child qu'il formait, dans les années 1960, avec le batteur Lucas Sideras et Vangelis, alors un des futurs grands compositeurs de musiques de film.
Aphrodite's Child, c'est du rock psychédélique, parfois du hard rock, mélangé à de la «musique d'église».
Aphrodite's Child, c'étaient — comme m'avait dit un jour une vieille amie anarchiste qui a connu «ces années-là» — les hippies romantiques par excellence.
Musicalement très fort, le groupe enchaînera les tubes — Rain and tears, It's five o'clock, I want to live, etc. —, mais je vous propose de redécouvrir ici son double album, 666. Projet qui referme l'histoire Aphrodite's Child après deux précédents albums, avec un Demis de plus en plus distant — même si, des années plus tard, il retravaillera avec Vangelis, notamment sur la bande originale du film Blade Runner.
666, adaptation musicale de l'Apocalypse de Saint Jean, est clairement l'un des plus grands albums rock de toute l'histoire, à découvrir ou redécouvrir. Avec la participation — orgasmique, et ce n'est pas au sens figuré — d'Irene Papas sur le second disque.
 Louison-Antoine

06/02/2015

Le langage en politique (1/3)

george_orwell_poster-r498b62ece7aa4b15a36a0135be6df661_wvg_8byvr_324.jpg« Les relations qu’il y a entre les habitudes de pensée totalitaires et la corruption du langage constituent une question importante qui n’a pas été suffisamment étudiée. » (George Orwell cité par Simon Leys dans Orwell ou l’horreur de la politique)
Nous pouvons nous inspirer de la pensée orwellienne afin de relever l’importance du langage – ainsi que de l’histoire, comme nous le voyons plus loin – dans la politique. Avant cela toutefois, j’aimerais évoquer le philosophe français Henri Bergson (1859-1941) qui conçoit la conscience intégrale à travers un apport remarquable de l'intuition, complétant celui de l'intelligence, pense que le pouvoir du langage – outil d'expression de cette dernière – est limité afin de discerner convenablement l'individualité. Par le règne de l'intelligence – forcément « sous l'influence du langage » –, il craint la tendance de « lire des étiquettes collées » sur les choses. Ces deux dernières expressions sont tirées de son livre Le rire (1900) dans lequel il écrit également ce passage : « Quand nous éprouvons de l'amour ou de la haine, quand nous nous sentons joyeux ou tristes, est-ce bien notre sentiment lui-même qui arrive à notre conscience avec les mille nuances fugitives et les mille résonances profondes qui en font quelque chose d'absolument nôtre ? Nous serions alors tous romanciers, tous poètes, tous musiciens. Mais le plus souvent, nous n'apercevons de notre état d'âme que son déploiement extérieur. Nous ne saisissons de nos sentiments que leur aspect impersonnel, celui que le langage a pu noter une fois pour toutes parce qu'il est à peu près le même, dans les mêmes conditions, pour tous les hommes. Ainsi, jusque dans notre propre individu, l'individualité nous échappe. Nous nous mouvons parmi des généralités et des symboles, comme en un champ clos où notre force se mesure utilement avec d'autres forces ; et fascinés par l'action, attirés par elle, pour notre plus grand bien, sur le terrain qu'elle s'est choisi, nous vivons dans une zone mitoyenne entre les choses et nous, extérieurement aux choses, extérieurement aussi à nous-mêmes. »

Ainsi, nous devinons que le langage peut être une bonne arme de manipulation, aussi bien dans les relations les plus classiques de la vie quotidienne que pour le pouvoir politique.
En même temps, l’existence de cette précédente « zone mitoyenne » doit nous rassurer sur l’incapacité de ce dernier à nous rendre absolument corruptibles et serviles. En ayant conscience de cette « zone », il faut parvenir, dans la vie de tous les jours, à cultiver notre individualité – autrement dit, à garder en conscience, en permanence, une dose suffisante d’individualité – pour conserver notre libre arbitre et notre esprit critique.

George Orwell, à travers ses œuvres comme les célèbres romans 1984 et La ferme des animaux, nous interpelle spécifiquement sur l’importance de la maîtrise du langage par le pouvoir politique permettant à celui-ci d’asseoir sa domination.
Dans ces précédents ouvrages, sont décrites des sociétés imaginaires. Leurs ressemblances avec les régimes nazi et soviétique du siècle dernier sont frappantes et officialisées. Seulement, nous pouvons relever également des traits de ressemblance avec notre société capitaliste et son oligarchie libérale. Cette approche se veut bizarrement moins officielle…
Il faut bien préciser le sens que prend ici l’expression « maîtrise du langage ». Par langage, il ne faut pas entendre logos ou raisonnement logique au service de la vérité mais simplement l’ensemble des mots – écrits ou parlés – utilisés dans une société. Donc, par « maître du langage », il ne faut pas entendre maître du logos, philosophe amoureux de la vérité et confirmé dans le domaine de la dialectique – définition que, sinon, j’affectionne. Au contraire ici, le maître est le dominateur dans son sens évidemment péjoratif. Le « maître du langage » est le responsable de la parole officielle, des écrits officiels. Il fait donc attention au langage des individus qui doivent se plier à ces derniers. Le « maître du langage » – expression à laquelle je prends donc soin de mettre des guillemets – peut aller du néo-sophiste membre de l’intelligentsia au pur et simple policier de la Pensée correcte.
J’aurais pu parler de contrôle plutôt que de maîtrise (du langage). Le premier mot peut plus fréquemment prendre un sens péjoratif. Or, justement, maîtriser le langage d’autrui, ce n’est pas simplement le comprendre mais c’est le connaître si bien que c’est en être le créateur et le précurseur. C’est pire que le contrôler. Celui qui me contrôle peut se contenter de me surveiller – éventuellement dans l’impermanence. Celui qui me maîtrise est devenu mon maître. Il sait tout sur moi, sans que j’en aie forcément conscience – but éventuellement recherché par le maître afin que sa domination soit moins visible tout en ne perdant rien en intensité. Le maître ne fait pas que contrôler mes faits et gestes, il les anticipe. Dans un sens, il peut se passer de les contrôler – comme il appuierait sur une télécommande pour que je réalise telle ou telle action – tant qu’aucune des conséquences de mes faits et gestes n’échappe à sa conscience. C’est le dompteur et son animal dompté.
Maintenant, l’homme attaché à un sens noble ou artistique, ou simplement scrupuleux, des notions de maître et de langage peut, par conséquent, préférer l’expression « agent de la pensée correcte ». Cet agent, en tant qu’intellectuel, est plutôt du côté de l’action préventive. En tant que responsable ou exécutant de la censure, il est du côté de l’action répressive.

Les dirigeants de la Pensée correcte, ainsi responsables du langage public et vrais patrons des médias, peuvent mettre en avant telle notion plutôt qu’une autre, ostraciser telle ou telle autre. Ce sont, dans un sens, de vrais professionnels de la communication. Cela peut avoir un lien avec la mercatique même si elle concerne, a priori, le monde du commerce. Mais en même temps, elle a évidemment à voir avec la pensée unique. Ses agents ne veulent pas forcément vous interdire de dire telle ou telle chose mais faire en sorte que vous pensiez vraiment autrement pour ensuite aller tout naturellement dans le sens de la pensée correcte. La logique est bien totalitaire. Le langage public sous la domination du « maître du langage » doit faire naître, ou bien disparaître, certaines habitudes verbales dans le langage qu’on retrouve dans les liens privés et intimes. Les mots peuvent même prendre un nouveau sens, éventuellement contraire à l’original. D’où, par exemple dans La ferme des animaux, cette devise donnée aux animaux qui, pour une très grande majorité d’entre eux, s’y plient : « La guerre, c'est la paix. La liberté, c'est l'esclavage. L'ignorance, c'est la force. » Aussi, en allusion à un slogan présent dans le film Oublier Cheyenne (2006), si « le gouvernement nous pisse dessus, les médias nous font croire qu'il pleut ». Louison Chimel, extrait des Cahiers d'un Anarchiste conservateur

31/01/2015

Entrevue de Demis Roussos en son hommage

22/01/2015

Les Guignols de l'Info et la théorie du complot


Les Guignols de l_Info et la Théorie du Complot par Matricecensuree

04/01/2015

Etienne Chouard sur la démocratie des sociétés dites primitives

26/12/2014

L'Evangile selon Saint Matthieu, Pier Paolo Pasolini

Retrouvez, en ces temps de fêtes, un chef d’œuvre pasolinien, L'Evangile selon Saint Matthieu.
A l'année prochaine, chers lecteurs... Louison Chimel

« Si l'on y réfléchit bien, le Christ est le seul anarchiste qui ait vraiment réussi. »
(André Malraux, La création artistique)

13/12/2014

Le besoin de définir un intérêt commun, Errico Malatesta

XB1993.22.000.jpgEt comment les ouvriers pourraient-ils pourvoir aux besoins urgents s'ils ne sont pas déjà habitués à se réunir et à discuter ensemble des intérêts communs et ne sont pas déjà prêts, d'une certaine façon, à accepter l'héritage de la vieille société ?
Dans une ville où les négociants en grain et les patrons boulangers auront perdu leurs droits de propriété et, donc, l'intérêt à approvisionner le marché, dès le lendemain il faudra trouver dans les magasins le pain nécessaire à l'alimentation du public. Qui y pensera si les ouvriers boulangers ne sont pas déjà associés et prêts à travailler sans les patrons et si en attendant la révolution, ils n'ont pas pensé par avance à calculer les besoins de la ville et les moyens d'y pourvoir ?
Nous ne voulons pas dire pour autant que pour faire la révolution, il faut attendre que tous les ouvriers soient organisés. Ce serait impossible, vu les conditions du prolétariat, et heureusement ce n'est pas nécessaire. Mais il faut du moins qu'il y ait des noyaux autour desquels les masses puissent se regrouper rapidement, dès qu'elles seront libérées du poids qui les opprime. Si c'est une utopie de vouloir faire la révolution seulement lorsque nous serons tous prêts et d'accord, c'en est une plus grande encore que de vouloir la faire sans rien et personne. Il faut une mesure en tout. En attendant, travaillons pour que les forces conscientes et organisées du prolétariat s'accroissent autant que possible. Le reste viendra de lui-même. L'Organisation, Errico Malatesta, 1897)

08/12/2014

Ubik, par Philip K.Dick, extrait

UBIK.jpgLa porte refusa de s'ouvrir et déclara:
— Cinq cents, s'il vous plaît.
A nouveau, il chercha dans ses poches. Plus de pièces; plus rien.
— Je vous paierai demain, dit-il à la porte. (Il essaya une fois de plus d'actionner le verrou, mais celui-ci demeura fermé.). Les pièces que je vous donne constitue un pourboire, je ne suis pas obligé de vous payer.
— Je ne suis pas de cet avis, dit la porte. Regardez dans le contrat que vous avez signé en emménageant dans ce conapt.
Il trouva le contrat dans le tiroir de son bureau: depuis que le document avait été établi, il avait eu besoin maintes et maintes fois de s'y référer. La porte avait raison; le paiement pour son ouverture et sa fermeture faisait partie des charges et n'avait rien de facultatif.
— Vous avez pu voir que je ne me trompais pas, dit la porte avec une certaine suffisance.
Joe Chip sortir un couteau en acier inoxydable du tiroir à côté de l'évier; il s'en munit et entreprit systématiquement de démonter le verrou de sa porte insatiable.
— Je vous poursuivrai en justice, dit la porte tandis que tombait la première vis.
— Je n'ai jamais été poursuivi en justice par une porte. Mais je ne pense pas que j'en mourrai.

Ubik, Philip K.Dick (1969)