25/06/2012
Critique de la raison progressiste
"Quelqu'un se risquera bien à écrire un jour, sur le modèle de l'opération kantienne, une Critique de la Raison progressiste exposant l'ensemble des formes a priori de sa sensibilité et des catégories de son entendement. On comprendra sans doute mieux, alors, comment ce sont les structures transcendantales de cette Raison qui lui interdisent a priori de construire un certain nombre d'énoncés. Par exemple, une proposition aussi simple que «dans ce domaine précis, les choses allaient mieux avant», est impossible à former, pour l'entendement progressiste, quel que soit le domaine de référence, précisément parce que son interdiction est d'origine transcendantale. C'est pourquoi un progressiste — et particulièrement un progressiste de gauche — est toujours saisi par la crainte et le tremblement, chaque fois que vient à s'immiscer en lui l'idée diabolique que sur tel ou tel point, la situation était peut-être meilleure à un stade moins avancé du développement capitaliste. La terreur qui l'envahit et le paralyse à ce moment précis est alors, comme chacun l'a déjà deviné, celle qui doit tenir l'être humain éternellement éloigné du péché des péchés : celui d'avoir eu, même malgré soi, une mauvaise pensée, c'est-à-dire une pensée réactionnaire." Jean-Claude Michéa, Orwell éducateur, pp. 84-85.
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