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08/11/2014

Mes racines sont profondes

Mes racines sont profondes, Mes racines sont profondes, MES RACINES SONT PROFONDES !!!
Depuis toute jeune... d'aussi loin que je me souvienne, mon grand-père m'a toujours dit : « Petite fleur d'eau, soit toujours fière de qui tu es, car bien des gens essayeront de te l'enlever... mais personne ne peut enlever, d’un cœur, les racines qui nous sont chères... Comme l’érable qui fut coupée pour nous réchauffer, il aura toujours ses racines dans sa terre... Ses racines sont profondes !!! » Et chaque fois que mon grand-père disait cela, il sortait toujours du grenier son tambour... Dès qu’il commençait à faire danser ses mains sur la peau du tambour, moi je sentais en moi une étrange sensation qui enivrait tout mon être... au point où je fermais les yeux et j'entendais dans ma tête les chants de mes ancêtres... En vieillissant, je compris que je devais laisser sortir de moi ces racines qui me sont chères !
La première fois que j’ai laissé sortir de moi mes racines.... J'avais douze ans à cette époque et je m'en souviens comme si c'était hier !!! De ce jour-là, je me souviendrai toute ma vie !!! Ma mère et mon grand-père étaient partis tous deux à la chasse à l’originale... J’étais dans le salon tranquille à peindre comme à l’accoutumance et j’ai eu ce sentiment d’attirance envers le tambour de mon grand-père... Ce tambour me parlait en silence et me disait : « Petite fleur d'eau ! Petite fleur d'eau ! Viens toucher la peau de mes accords, viens caresser les notes qui t’emportent !!! » C’était plus fort que moi... J’écoutai la voix du tambour et, tout en cachette, je montai au grenier prendre entre mes mains le tambour de grand-père... Malgré l’interdiction formelle que nous y touchions, je n’avais pas pu résister à cette voix qui appelait mes racines à sortir de leur nid... Je pris le tambour entre mes mains et, dès lors, je sentis en moi toute la poussière de l'histoire qu’a vécu mon peuple... Il ne prit pas plus d’une seconde avant que mes mains soient ensorcelées... Je me mis a jouer... d’abord doucement avec les délicatesses d’une femme... puis de plus en plus fort comme le ferrait un guerrier... Je me sentais bien... J'étais en harmonie avec ce tambour... Je sortis dehors tout en continuant de jouer à grands coups. Une fois dehors, j’arrêtai de jouer du tambour. Un silence harmonieux, d’où venaient chanter les oiseaux et le vent, s’installa en moi et tout autour de moi... Je ne faisais qu’une avec la nature... Ce grand sentiment d’être liée étroitement à la nature me donna envie de jouer encore et encore pour elle... Je me remis à jouer... Et puis, sans le savoir, je me mis à chanter comme mes racines... Puis le chant et la musique donnèrent peu a peu envie à mes pieds de faire partie de ce grand spectacle... Je me mis à danser... Ah ! Comme il était bon de jouer, chanter et danser en harmonie avec la nature si grande et puissante... Mais avec tout ça, j'avais oublié de regarder l’heure... et grand-père et maman s’en revenaient de la chasse, le soleil se couchait et laissait déjà entrevoir une claire lune blanche et ronde... Je crois que ma mère et mon grand-père avaient dû entendre mes chants depuis loin dans la forêt. Car quand ils arrivèrent, mon grand-père se mit à pleurer… et c’est là que j’arrêtai de jouer... pensant que grand-père était fâché contre moi d’avoir jouer avec ce tambour...
« Je t’en pris, Petite fleur d'eau... continue a faire danser tes mains et tes pieds, laisse tes racines sortir de toi... » Ce furent les mots de mon grand-père... alors pour ne pas l’offenser d’avoir pris sans permission ce trésor de notre culture, je pris avec honneur le tambour et je rejouai devant mon premier public...
Quelques coups de tambour en silence, puis les chants se remirent de la partie... Je ne laissai que les mots sortir de moi… l’expression de mes racines profondes... C’était la paix autour malgré l’angoisse des représailles, je savais que j’avais fait pour le bien et même si cela n’était pas l’avis de tous...
Quand j’eus fini de jouer, chanter et danser... je lançai un regard à mon grand-père... et je me lançai à genoux devant lui... le suppliant de ne pas me faire de représailles... Et là, je lui expliquai que c’était le tambour qui m'avait parlé, demandé de poser mes mains sur sa peau... Et dans un grand soupir, mon grand-père me fit signe de me taire et il prit la parole : « Tu sais, Petite fleur d'eau, si je vous ai tous interdit de toucher ce tambour – et vous êtes nombreux de mes petits enfants à avoir envié les mains qui toucheraient cette peau –, c'était pour que celui d’entre vous qui aurait les racines profondes et étendues puisse se prouver à la nature et à la vie... Ce que tu as fait, Petite fleur d'eau, c’est laisser tes racines parler pour toi... Il est certain que je suis fâché contre toi d’avoir enfreint les règlements, mais c’est le tambour qui t'a parlé... et donc ce sont tes racines qui t’ont parlé... Tu es pardonnée... Mais, je t’en prie, Petite fleur d'eau... prends ce tambour, je te le donne, et rejoue moi encore cette musique que tu jouais si bien... comme si tu avais pratiqué toute ta vie à jouer de ce tambour... Reprends tes chants, je t’en prie, ma Petite fleur d'eau... Tu joues comme ton arrière-grand-mère... Tes racines sont profondes. »
Alors, toute la nuit, pour Grand-père, je jouai du tambour, je chantai les anciens chants et dansai comme à l'algonquine... Et, toute la nuit, j'ai vu, dans les yeux de mon grand-père, une fierté sans égale... un regard que jamais je n'oublierai. Car, ce regard, je le porte en moi aujourd'hui...
Mes racines sont profondes, Mes racines sont profondes, MES RACINES SONT PROFONDES !!!
On peut couper l'érable et le chêne pour se réchauffer, mais leur racines resteront toujours a leur terre !!!
Mes racines sont profondes, Mes racines sont profondes, MES RACINES SONT PROFONDES !!!

Par Véronique Lavoie, alias Petite fleur d'eau qui a toujours soif de savoir

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