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09/01/2014

Révolte et conservatisme : les leçons de 1984 de G. Orwell

George-Orwell.jpg" La bourgeoisie ne peut exister sans révolutionner constamment les instruments de production, ce qui veut dire les rapports de production, c'est-à-dire l'ensemble des rapports sociaux. Le maintien sans changement de l'ancien mode de production était au contraire pour toutes les classes industrielles antérieures la condition première de leur existence. Ce bouleversement continuel de la production, ce constant ébranlement de tout le système social, cette agitation et cette insécurité perpétuelle distinguent l'époque bourgeoise de toutes les précédentes. Tous les rapports sociaux figés et couverts de rouille, avec leur cortège de conceptions et d'idées antiques et vénérables se dissolvent : ceux qui les remplacent vieillissent avant d'avoir pu s'ossifier. Tout ce qui avait solidité et permanence s'en va en fumée, tout ce qui était sacré est profané " (Marx, Manifeste Communiste, chap. 1)
Autrement dit, le capitalisme est par définition un système social auto-contestataire, et la dissolution permanente de toutes les conditions existantes constitue son impératif catégorique véritable. En persistant à se définir purement et simplement comme le " Parti du changement " et l'ensemble des " Forces de progrès ", la gauche moderne c'est-à-dire celle qui n'avait même plus l'excuse d'affronter pratiquement les puissances traditionnelles de l'Ancien régime ( puissances éliminées, pour l'essentiel , par les deux guerres mondiales ) - se trouvait donc condamnée à refermer définitivement le piège historique sur les travailleurs et les simples gens. Dans cette perspective triste mais moderne, la référence " socialiste " ne pouvait devenir qu'un autre nom du développement à l'infini du nouvel ordre industriel et, d'une façon générale, de l'approbation pré-critique de la modernisation intégrale et illimitée du monde ( mondialisation des échanges, tyrannie des marchés financiers, urbanisation délirante, révolution permanente des technologies de sur-consommation, etc.). On ne doit donc pas s'étonner si la peur pathétique d'apparaître " dépassé " par quoi que ce soit, peur qui tient lieu de pensée, de nos jours, chez la plupart des intellectuels de gauche, n'ait finalement trouvé à s'accomplir que dans les noces actuelles de l'Avenir radieux et du cybermonde, et à leur complément spirituel, cet esprit " libéral-libertaire " qui sévit désormais sans réplique dans l'univers mensonger du showbiz et des médias.
C'est une époque assez curieuse que celle où les banalités de base sont tenues pour des paradoxes. Pourtant si, tout au long du siècle, les ambitions historiques de la gauche ( et plus encore de l'extrême gauche ) ont pu si facilement être retournées contre les peuples, si le " progressisme " et la " modernisation " apparaissent de plus en plus nettement comme la simple vérité idéalisée du Capital, c'est bien le signe que l'adoption déculpabilisée d'un certain conservatisme critique est désormais l'un des fondements nécessaires de toute critique radicale de la modernité capitaliste et des formes de vie synthétiques qu'elle prétend nous imposer. Tel était, en tout cas, le message d'Orwell. A nous de rendre à son idée d'un " anarchisme tory " la place philosophique qui lui revient dans les différents combats de la nouvelle Résistance. (Orwell, anarchsite tory - Jean-Claude Michéa)

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