28/05/2012
Carnet Noir et Rouge. Partie 1a
J’aime la ville de Bourg-en-Bresse, en raison notamment de son centre ville avec ses rues piétonnes et ses maisons anciennes.
Le café que je rejoins pour suivre un récital de poésie et un débat philosophique est tout de pierres vêtu. Des poutres les encadrent. A l’étage, il y a les toilettes. Il faut escalader l’une d’elle afin de parvenir au lavabo. C’est un vieux lavabo marron, très plat et cossu. Il est dans un coin de la pièce. Le sol est tout en bois.
Toujours à l’étage, il y a des tables. Il est presque vingt heures et, avec les couverts qui les garnissent, elles sont prêtes pour recevoir, le lendemain midi, des clients à manger. J’aime ce lieu ancien. J’aime les lieux qui n’ont pas trop changé sur des décennies. Sans doute y ressens-je des âmes plus lointaines et profondes. Ou bien c’est mon côté réactionnaire qui veut ça. A moins que le réactionnaire soit simplement celui qui se souvient mieux qu’un autre de ses vies antérieures…
J’aime particulièrement l’Ardèche. Ce département français est quelquefois considéré comme le plus sauvage de France. Le plus sauvage donc le plus anarchique ? Etre anarchique n’est pas relever d’un désordre mais d’un ordre en rapport à son unicité. Ce dernier est le seul ordre authentique de libération !
Celui qui était déjà lui-même et qui n’a pas connu de transformations, celui qui plus brièvement est resté lui-même est anarchique ! L’Ardèche, avec ses nombreux villages de pierres, n’a point connu de turbulences. Il est resté globalement lui-même. Son authenticité n’est pas à démontrer, elle respire la liberté.
Il ne s’agit pas de prôner un quelconque conservatisme. Les conservatistes sont des idéologues comme les autres. En outre, je n’aime pas le mot « conservateur ». Il me fait penser matériellement aux produits chimiques injectés dans la nourriture industrielle afin qu’elle soit comestible plus longtemps. Politiquement, il me fait penser à la droite chrétienne et je ne suis ni religieux ni capitaliste. En effet, cette droite est capitaliste. Quant à la gauche, elle l’est également souvent dans notre Occident. Et puis je ne suis pas un bourgeois, le clivage gauche-droite est une invention de la démocratie bourgeoise. La démocratie bourgeoise est la bourgeoisie souveraine. Ce n’est pas synonyme de « peuple souverain ». Pour en revenir à la chrétienté, je croyais qu’elle disait : « Aimez-vous les uns les autres. » Ou encore : « Aimez votre prochain comme vous-même. ». Qu’en dit Hugo Chavez ? « Il s’agit de la solidarité avec le frère. Il s’agit de la lutte contre les démons que le capitalisme a semés : l’individualisme, l’égoïsme, la haine, les privilèges. (…) Je suis chrétien et je pense que le socialisme doit se nourrir des courants les plus authentiques du christianisme. » Nul besoin d’être croyant pour y trouver une cohérence. La devise républicaine « Liberté, égalité et fraternité » n’aurait jamais existé sans le catholicisme français et les vertus soutenues par l’Eglise. Combien de fois, par ailleurs, le socialisme a été conçu comme un dépassement de la République ? Le catholicisme social originel s’oppose au libéralisme à la fois économique et politique. Le socialisme chrétien se fonde sur la volonté de transformer la société en rejetant le capitalisme, en s’inspirant de théories socialistes et de l’humanisme chrétien.
N’étant pas croyant, je préfère à chrétien l’adjectif romantique. Pourquoi d’abord le socialisme ? C’est l’espace économique des possibles les plus justes. Les idéologues seront intransigeants sur tel ou tel socialisme spécifique, c’est le totalitarisme qui est à bannir. Et il a toujours été dépendant de l’existence de la propriété au sens capitaliste, aussi bien dans le régime nazi – dit pourtant national-socialiste – que soviétique – dit communiste donc anticapitaliste. Quid du totalitarisme sans capital ?
Préférant l’anarque au politique, je n’ai aucune obsession concernant un socialisme spécifique. En revanche, l’idée de rupture avec le capitalisme – origine logique de tout mouvement socialiste qui se respecte – m’intéresse. De cette idée de rupture, dépend bien entendu la révolution. A ma simple échelle individuelle, je ne peux que fantasmer la révolution. C’est mon côté romantique.
Un socialisme romantique réunit les meilleurs aspects des socialismes libertaires et associatifs. Il est surtout bon pour les utopistes, vous vous dites ? Sans doute. Le socialisme romantique, c'est bien pour les écrivains socialistes et les écrivains romantiques. Ce qui compte, c’est leur authenticité puis quand ils se marient entre eux et font des enfants. Plus sérieusement, en France, l’usine à gaz politique appelée Parti socialiste est, en l’occurrence, hors jeu.
Je veux revenir sur le mot « conservateur » que je n’aime pas. Simplement, il est légitime de désirer conserver ce qui est soi. Car ce qui est soi est ce qui est libre. Autrement, son identité est en crise. Un des risques alors est le mépris de l’identité de l’autre et, de là, le mépris de l’autre dans son essence.
Louison Chimel
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